Melos est un homme d’une trentaine d’années, au port solide et à la présence discrète mais déterminée. Ses cheveux blonds, longs jusqu’aux épaules, sont souvent attachés en arrière de manière pragmatique. Il dégage la robustesse d’un habitué des quais et des travaux pénibles : un corps taillé par le labeur, non par la discipline militaire. Sa démarche est lourde, ancrée, avec l’habitude d’un homme qui surveille son environnement sans en avoir l’air.
Sa carrure est large, épaules puissantes, avant-bras noueux et mains calleuses marquées par les cordages et les chaînes. Des cicatrices fines recouvrent ses flancs et son dos — souvenirs de sa captivité — tandis que d’autres, plus irrégulières, témoignent de bagarres improvisées.
Son visage présente des traits anguleux : mâchoire carrée, pommettes saillantes, et des cernes persistants qui rappellent des années de nuits écourtées. Ses yeux bleu-gris portent une fatigue ancienne, mais aussi une résolution tranquille, le regard de quelqu’un qui a connu le pire et refuse d’y retourner.
Melos porte en général une armure pratique, choisie pour la fonctionnalité bien plus que pour l’esthétique. Il se protège avec un solide bouclier en acier, marqué par les impacts, et manie un morgenstern — une arme simple, fiable, qui ne triche pas.
Ses vêtements sous l’armure sont robustes et souvent rapiécés. Il porte discrètement, cousue sur une pièce de tissu ou sur le revers de sa tenue, une rose brisée, symbole de Milani, faite main faute de symbole officiel. Rien dans son équipement ne respire la richesse ; tout évoque la résilience et la nécessité.
Melos est un homme réservé, qui pèse ses mots. Il reste dans le concret, préfère les actes aux discours, et a une patience forgée par la souffrance. Il n’aime pas s’imposer, mais dès qu’il voit quelqu’un vulnérable, son instinct protecteur prend le dessus.
Il peut paraître dur au premier abord, mais jamais cruel.
Il garde encore des réflexes d’homme marqué : surveiller les sorties, vérifier qui observe, garder le dos contre un mur.
Pourtant, dès qu’il se sent en confiance, il laisse apparaître un humour simple, discret, presque timide.
Melos avance avec quelques certitudes :
- Il refuse de retourner à une vie sans horizon.
Il veut apprendre, devenir meilleur, comprendre ce nouveau rôle qu’il a accepté presque malgré lui.
- Il veut rendre ce qu’on lui a donné.
On lui a ouvert une porte quand il était au fond du trou ; il veut offrir cette même porte aux autres.
- Il cherche un but qui dépasse sa survie.
Pas une routine, pas un travail de dock encore… il veut un combat juste, clair, où sa force sert enfin à quelque chose de droit.
- Il fuit encore l’ombre de ce qu’il a été.
Pas par honte, mais parce qu’il sait qu’il n’est pas encore à l’abri de retomber.
La guilde Ravel, Milani et le combat contre l’oppression sont sa boussole — et son filet de sécurité.
Melos Varetti est né dans l’un des quartiers les plus miséreux d’Absalom : les docks.
Son père était débardeur, sa mère journalière dans une conserverie.
La famille n’avait ni influences ni privilèges : juste des mains usées et un dos courbé sous la fatigue.
Très tôt, Melos apprend deux choses :
- La mer ne donne rien gratuitement.
- Personne ne protège les pauvres, pas même la loi.
Mais malgré la dureté des quais, le jeune Melos n’a jamais été mauvais.
Il était de ceux qui partageaient leur repas, même maigre, et qui intervenaient quand un marin ivre tapait trop fort sur quelqu'un.
Cette impulsion de justice lui coûtera cher.
À vingt-six ans, alors qu’il chargeait des caisses pour un entrepôt, les miliciens de la Légion locale ont lancé une rafle brutale, officiellement contre les contrebandiers, officieusement pour récupérer des pots-de-vin et arrondir leurs fins de mois.
Melos a vu un milicien frapper une femme qui refusait de donner son maigre argent.
Il est intervenu.
Il a attrapé le poignet du milicien pour arrêter le coup.
Le geste a été perçu comme une agression.
La sanction a été immédiate : Melos a été arrêté, roué de coups, et présenté devant un magistrat corrompu.
Son procès a duré moins de dix minutes.
La sentence :
« Détention ordinaire jusqu’à reconduite administrative. »
Un euphémisme pour dire prison jusqu’à ce que quelqu’un veuille bien te libérer ou t’oublier.
La vie dans les cellules d’Absalom est une lente agonie.
Melos a perdu du poids, a souffert du froid, a été brisé moralement.
Mais c’est là, au plus profond des ténèbres, qu’il a connu deux événements qui ont changé sa vie :
Une nuit, alors qu’il suffoquait sous l’angoisse, il a rêvé — ou cru rêver — d’un corridor de pierre envahi par l’obscurité.
Une silhouette fine s’est approchée.
Elle tenait une rose rouge dégoulinante de sang.
Les pétales étincelaient comme des braises.
Elle a posé la rose dans sa main.
Les chaînes autour de ses poignets se sont fendues, sans se briser.
Comme une promesse inachevée.
Une voix, douce mais implacable :
« Tu n’es pas né pour plier. Relève-toi. Brise ce qui t’enchaîne — dehors, et dedans. »
Il s’est éveillé en pleurant.
Il n’avait jamais entendu parler de Milani, mais il savait que ce n’était pas un simple rêve.
Dans la même période, il rencontre Ardis, un vieil homme maigre et calme, enfermé pour crime de sédition.
Ardis était un ancien prédicateur de Milani.
Il parlait peu, mais chacun de ses mots portait un poids immense.
En voyant Melos abattu, il lui dit :
« Tu n’es pas un criminel. Tu es un homme qu’ils ont voulu faire taire. Si tu veux changer, commence simplement par te relever. »
Ardis l’aide à comprendre la vision :
Milani choisit rarement les puissants.
Elle choisit ceux qui ont été écrasés… et qui refusent de devenir des bourreaux.
Deux semaines plus tard, Ardis meurt d’épuisement.
Son dernier mot à Melos : « Transmets. »
Melos sort de prison après deux ans, « faute de place utile ».
Il n’a rien : pas de travail, pas d’ami, pas d’argent, une réputation de fauteur de troubles, un casier qui l’empêche d’être embauché, et une culpabilité tenace.
Il porte en lui une colère sourde, mais aussi le souvenir d’Ardis… et ce rêve de rose.
Quelques jours après sa libération, Melos assiste à l’agression d’un enfant par un petit gang local qui rackette les orphelins et les mendiants.
Par réflexe, il s’interpose.
Il prend un coup de couteau dans les côtes.
Mais au lieu de tomber…
il sent une chaleur monter dans sa poitrine, un élan qu’il n’avait jamais connu.
Sa main se pose instinctivement sur la plaie de l’enfant, et une lumière rouge et blanche — douce mais vibrante — coule dans ses doigts.
L’enfant respire à nouveau.
Melos reste figé, terrifié et émerveillé.
Il comprend :
Milani l’a choisi.
Il n’a aucune formation, aucun passé héroïque.
Juste un cœur qui refuse l’injustice.